Un photographe, une assos

 

Lucie Luu : Bonjour Matthieu, vous êtes photographe amateur, comment avez vous commencé la photographie ?

Matthieu Colin: Depuis toujours je m'intéresse à l'image, ce qu'elle raconte, ce qu'elle dévoile, ce qu'elle révèle. J'ai toujours fait de la photographie, comme ça sans arrières pensées. Mon oeil était plus ou moins en travaux... Mais depuis 5 mois, un ami photographe m'a vivement recommandé de "montrer" mes photographies. Mon regard, d'après lui, était unique, simple et épuré... Je n'y ai vraiment pas cru, doutant toujours de moi... Face à des Cartier-Bresson, Doisneau... je ne faisais pas le poids... Mais l'idée a germé, et un matin, je me suis levé en disant: je vais montrer mes photographies...
Depuis, à chaque cliché, je pense à "l'après" de la photo... ce qu'elle peut devenir...
On peut donc dire que je fais réellement de la photo depuis 5 mois.


Figure 1 - Illustration © Matthieu Colin

LL : Et en 5 mois vous avez eu le temps de créer un association qui tourne autour de la photographie ?

MC :Tout s'est enchaîné très vite à partir du moment où mon ami photographe,
Philippe Pennec, m'a vivement conseillé de "montrer" mes photographies au public. J'ai construit mon site internet (ne y mettant pour commencer des clichés que je ne retiens plus aujourd'hui -on évolue tous les jours), puis j'ai cherché un lieu d'exposition, qui fut mon propre centre de bronzage sur paris (rue du temple), de là il fallait trouver un thème, chose fut trouvée avec BALADES... (carnet de voyage, ombres, lumières, couleur, matières: dans un centre de bronzage, ça collait bien)... Ensuite il a fallut faire tirer les photos, les installer sur place... les réactions du public étant étonnamment encourageantes, j'ai dû me pencher sur l'élaboration d'un catalogue tarifaire qui présenterait d'autres photographies, avec leur prix... ET vint le moment des ventes des photos: à ma grande surprise, des personnes voulaient acquérir mes photographies! Il fallait que je me prépare à ces opportunités. N'étant pas photographe de métier, je voulais rester dans la légalité. L'argent qui viendrait de ces ventes devait, à mon sens, servir une cause utile et valorisante... Mon meilleur ami Daniel m'a donc proposé de créer une association loi 1901, sur le compte de laquelle tous les bénéfices des ventes de mes photographies iraient. Je ne me feraient aucun bénéfice propre, mais cela permettrait de créer d'autres photographies. De ce fait, l'association PORTFOLIO-photographies fut créée le 1er septembre 2004, avec pour objet principal l'aide aux jeunes artistes, dans tous les domaines que ce soit mais particulièrement la photographie. Après avoir vendu pour le moment 6 photographies, l'association peut maintenant commencer à oeuvrer dans le but qu'elle s'est fixée: nous débuterons donc notre première collaboration avec une artiste peintre que nous allons exposer... rue du temple pour commencer. Tous s'est donc enchainé au grès des rencontres, des propositions et des opportunités... rien de tout cela n'était envisagé il y a de cela 4 mois!

LL: Vous ne faites pas les choses à moitié ! Quelles sortes d'aides proposez-vous aux jeunes dans tous les domaines et en particulier dans la photographie ?

MC: Pour le moment, l'association ne peut pas prendre en charge complètement un artiste. Créée il y a donc un mois, elle est jeune et a besoin de soutiens financiers. Des dons de n'importe quelle somme sont les bienvenus, tout comme des personnes désireuses de devenir membres actifs (2 artistes le sont pour le moment).
Les collaborations que nous envisageons sont de plusieurs types :
- prendre sous notre aile un jeune artiste qui débute, qui ne connait pas les "rouages" du métier: les expositions, les dossiers de presse, les contacts que nous pouvons avoir etc...
- nous voulons aussi avoir la possibilité de leur trouver des cours de photographies, ou les mettre en contact avec de véritables photographes professionnels que nous connaissons
- financièrement, nous souhaitons à l'avenir aider ces jeunes artistes en participant à leurs frais, par ex, de tirages, d'expositions...
- une fois l'association solide et forte de nombreux membres actifs, des expositions collectives seront envisagées sous la forme de portes ouvertes, d'ateliers ou de manifestations publiques sur plusieurs jours...

 

 

A chaque photographe son style...


LL : J'espère que votre message sera entendu car c'est une initiative digne d'être soutenue.Parlons de vos photos, quels sont vos thèmes favoris de photographie ?

MC: J'aime le soleil. J'aime la lumière en général. Je suis attirée vers elle comme un papillon vers une fleur... Elle est la vie, elle est ma vie. Cette élévation vers le ciel qu'on peut retrouver dans mes photographies sont un désir d'ambition clair. Je n'aime pas le terre à terre, j'aime passer des caps, franchir des barrières, aller plus loin... Je n'irai pas jussqu'à dire que je souhaite atteindre le soleil, mais élever mon âme vers 1% de pureté serait, à la fin de ma vie, une preuve que je n'ai pas perdu mon temps. Je suis donc attiré vers la couleur, particulièrement le bleu et le vert. Je trouve ces couleurs intéressantes car elles peuvent décliner vers du chaud comme vers du froid... Le bleu d'un ciel cubain peut devenir le bleu de la glace... Ces contrastes me passionnent.
La lumière est ma principale source d'inspiration, tout comme la matière.La série que j'ai fait dans le métro n'est pas du tout joyeuse... elle ne reflète pas des moments de vacances, de ressourcement... Mais j'aime jouer avec ses lumières blafardes, ses matières cimentée, ses longs couloirs anonymes... J'aime ce que ces lieux dégagent, j'aime rendre beau ce qui ne l'est pas à priori. Quand des personnes me disent: cette photo dans le métro est sublime, j'en suis ravi, car je leur ai montré ce qu'ils voient tous les jours... sans réellement le retenir... je suis ravi que les gens retiennent mes photographies.

Figure 1 - Illustration © Matthieu Colin

 

Figure 2 - Illustration © Matthieu Colin


LL : Comment décririez-vous votre style ?

MC : Avant ces 4 mois, je n'aurai jamais pu répondre à cette question. Ce sont les personnes qui ont vu mes photos qui m'ont trouvé un style. De part la récurance de certains thèmes, couleurs, lumières... ils ont trouvé que j'avais un style très épuré,allant à l'essentiel. La pureté s'alliant à la simplicité. Du coup, j'en ai tenu compte et l'ai en tête à chaque prise de vue, que j'effectue au feeling, quand j'en ai envie aux endroits dont j'ai envie; à mon rythme.
On peut dire dire que mon style est encore à trouver, bien que les premières pierres soient déjà posées.

LL : Avez-vous été influencé ou inspiré par des photographes ?

MC : pas réellement.J'ai été influencé dans ma façon de photographier par des photographes comme Alain-Charles BEAU, Philippe Pennec ou benoit Dufeutrelle. Ce dernier m'ayant énormément appris dans le "garder l'essentiel" "suggérer plutôt que montrer"... Tout est dans la subtilité. Se servir des choses pour dire autre chose ce pourquoi la chose a été faite... Je m'explique. La photo de Notre-Dame que j'ai pu faire aurait très bien pu être faite à partir d'une autre église, ce que je voulais faire ressortir est ce ciel d'après pluie extraordinaire, ce contraste entre l'élément air et l'élément terre: le fort contraste des la silhouette de notre-dame est là pour comparer ces deux élements. Benoit m'a beaucoup appris justement sur la comparaison... tout marche par comparaison: le bien, le mal, le bonheur, le malheur... l'un n'existe pas sans l'autre et ne peut exister que si l'autre est là, à côté... Le ciel de notre-dame n'aurait pas été si envoûtant si il n'était pas comparé à la silhouette noire de la cathédrale...

Figure 3- Illustration © Matthieu Colin

 

 

 

Photographie engagée ?


LL : Vous semblez être un photographe engagé, avez-vous un message particulier à faire passer dans chacunes de vos photos ?

MC :non pas du tout. je ne sais jamais comment une photo va être accueillie. Je prend des photos au grès de mes sentiments, de mes émotions... Je ne fais pas de photos de modèles, pas encore en tout cas, parce que je n'arrive pas encore à trouver une manière différente de tout ce qui a déjà été fait par les autres. Je ne veux pas faire comme les autres, je n'y vois aucun intérêt moral et artistique. Concernant ces photos en studio, elles se font avec préméditation en quelque sorte. Alors que moi, j'évolue dans la vie, avec ou sans l'appareil, et je vois des choses. Si l'appareil est là, tant mieux, sinon, je garde ça au fond de moi mais je ne reviens jamais sur un endroit en me disant: y a une photo à faire là-bas, j'y vais. Tout vient à moi... Je ne provoque presque rien. Ce sont ces images qui viennent à moi, quand elles le désirent, et c'est peut-être pour cela que je suis incapable d'expliquer un message... car tout se fait au feeling. Le seul sentiment que je veux faire ressentir par contre est la simplicité... Un garçon couché sur l'herbe, des parasols, un soleil, des colonnes... jouer sur les contre-jours, les ombres, couleurs... Le seul message que je pourrais donner est "faites ce que vous avez envi, sans penser aux autres. Si ça vous touche, ça touchera forcément quelqu'un. Et si une seule personne dans une vie arrive à "comprendre" et ressentir des émotions face à vos clichés, alors c'est que vous être arrivé à retenir quelque chose d'unique, qui vous est propre et personnel".

LL : Comment comptez-vous vous démarquer de ce que font les autres ?

MC: je ne compte pas me démarquer réellement.Je fais mes photos, celles que j'aime, celles qui m'inspirent, et voilà tout. Je ne cherche pas à vouloir être unique, je fais des images qui apparemment touchent les gens, tant mieux. Je veux juste rester fidèle à ce que je sui, ce que j'aime. Je ne prendrais aucune décision visuelle et esthétique parce que je veux me démarquer. J'évite par contre de faire comme tout le monde, là est la nuance.


Figure 1 - Illustration © Matthieu Colin Fuite

 

Figure 2 - Illustration © Matthieu Colin Cupidon


LL : Si vous n'aviez qu'une seule photo à retenir dans l'ensemble de votre travail, laquelle serait-ce ? Et pourquoi ?

MC: une seule photo, ce serait très difficile. ça dépend des moments. Je suis dans un jour assez triste donc je choisirais la photo "FUITE" parce qu'elle m'inspire du recueillement, de la fuite, du départ, dans un couloir sombre mais intéressant...
sinon, j'aime beaucoup cupidon endormi, parce qu'il s'agt de mon amoureux et que je le trouve sublime sur cette photo qui est pour moi la plus apaisante du lot.


LL : Avec quel appareil avez-vous réalisé ces photos ?

Ces photos sont faites: pour "fuite": numérique et "cupidon": lomo LCA argentique

LL : Merci Matthieu Colin pour votre implication dans la photographie, j'espère que d'autres photographes se joindront à votre cause.

Je rappelle ci-dessous les coordonées de votre association :

PORTFOLIO-photographies
13 rue édouard manet
75013 paris
08.71.70.20.79
01.45.84.20.93 (fax)


interview réalisée en octobre 2004 par Lucie Luu, photographe pour www.photosapiens.com

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